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Le duo syrah-viognier en Côte-Rôtie
AOC saint-joseph, les syrahs Guy Farge
Choses bues - Vins

Le duo syrah-viognier en Côte-Rôtie

Dans la vallée du Rhône septentrionale, le cru Côte-Rôtie n’a pas toujours été aussi chaud et dans l’ancien temps, les cépages blancs étaient valorisés dans les rouges. De cette façon, les vins trouvaient leur équilibre. Surtout les années où la maturité de la syrah n’était pas optimale.

Pour autant, le cru Côte-Rôtie – AOC communale – reste 100% rouge ! Commençons par présenter ce cru située au sud de Vienne, sur la rive droite du Rhône. L’appellation est la plus au nord du Rhône septentrional. Elle est née en 1940, son cépage majoritaire est la syrah obligatoire à hauteur de 80 %. Par le passé, s’opérait avec le viognier une chaptalisation naturelle et spontanée, par compensation de sous-maturité et de sur-maturité des cépages.

De cette habitude est née la complantation de ces cépages, et qui dit complantation dit co-fermentation. Cette tradition bien ancrée dans les habitudes a été reprise dans le cahier des charges de l’appellation. Aujourd’hui, on peut s’interroger sur la présence d’un cépage blanc dans la syrah rhodanienne. Pour certains, le viognier apporte de l’amertume. Pour d’autres, il donnera son côté floral au millésime.

Quoiqu’il en soit, ce cépage tannique habite les vins de la Côte-Rôtie à hauteur de 20 %, il doit donc garder son rang secondaire. Pour les domaines du cru, la question du viognier est devenue une question de style.

Certains domaines en jouent comme la cuvée Côte-Rôtie La Chana 2015 chez Benjamin et David Duclaux, généreuse en viognier avec un apport de 7 % pour un retour aux sources de l’appellation. Le domaine entend donner à ses vins un toucher de bouche plus délicat, plus soyeux.

Les pratiques sont partagées

Tout le monde n’utilise pas ce mariage. Par exemple, le domaine Gangloff parmi les domaines émergents les plus qualitatifs de ces dernières décennies, produit une cuvée 100 % syrah nommée La Barbarine, puissante avec ses arômes de tabac blond, de réglisse et de fruits noirs.

Le domaine produit une génération de cuvées 100% syrah sans apport de viognier. Dans la Côte-Rôtie, 45 % des producteurs vinifient la syrah seule et 55 % pratiquent la co-fermentation. Christophe Semaska utilise quant à lui le viognier à hauteur de 10 % dans certaines de ces cuvées, comme la cuvée Fleur de Montlys 2014 où le viognier vient jouer un rôle d’amplificateur aromatique sur un vin à fort potentiel de garde.

Dans la lignée de ceux qui utilisent le viognier à un pourcentage élevé, la Maison Vidal-Fleury produit une cuvée La Chatillone avec 12 % de viognier. Cette part plutôt importante peut attenter à l’intensité colorante de ce vin.

Dans le reste du Rhône Nord

Dans la vallée du Rhône septentrionale, il n’y a que le Cornas qui puisse être 100 % syrah, dans les appellations saint-joseph, crozes-hermitage, côte-rôtie, des apports de raisins blancs sont possibles.La proportion de cépages blancs sur l’appellation saint-joseph est possible à hauteur de 10 % tandis que la proportion passe à 15 % en crozes-hermitage.

Mais sur ces appellations, le co-fermentation est beaucoup moins fréquente qu’en côte-rôtie qui reste tête de cordée. De surcroît, sur l’appellation saint-joseph et crozes-hermitage, l’apport de cépage blanc peut se faire en roussanne et marsanne.

Pour finir, l’utilisation du viognier est uniquement réservée au cru Côte-Rôtie. Reste à savoir si cette tradition va perdurer avec le renouvellement du vignoble, et surtout à présent que les appellations saint-joseph et crozes-hermitage valorisent aussi leurs blancs secs avec brio, ce qui n’est pas le cas de la Côte-Rôtie.

Christelle Zamora


Christelle Zamora est une journaliste indépendante spécialisée dans le vin, la gastronomie et le tourisme. Elle a une formation de juriste en droit de la vigne et du vin, a suivi les cours du Wine and Spirit Education Trust (WSET), level 2 et 3. Impliquée dans la presse écrite de 1999 à ce jour, elle a co-écrit le Hors Série "1907-2007, un siècle rouge ardent" sur l'histoire du Midi rouge, période de fronde des vignerons languedociens et l'avancée de la mondialisation à compter des années 2000, pour Midi Libre. Pour ce titre, elle a intégré la rédaction des magazines pour 3 ans puis a été l'auteur d'un guide culturel. Parmi les artistes de la Bible de l'art singulier, éditions Livre d'Art en 2010. Elle a écrit plusieurs ouvrages dont "Limoux, vignoble d'histoire et de légendes" aux éditions Privat (nov. 2018), "Le vin en 365 jours" aux éditions PlayBac (oct. 2019), Le vin et la dégustation intuitive aux éditions Féret (nov. 2019).

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