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Picpoul-de-pinet sur tous les fronts
le vignoble de l'appellation picpoul-de-pinet
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Picpoul-de-pinet sur tous les fronts

L’appellation picpoul-de-pinet a égayé l’été de bien des vacanciers. Avec sa fraîcheur, ce vin blanc sec du littoral sétois sait traverser les mers. Côté culture, picpoul-de-pinet est encore là à nous raconter la vie. Cette appellation a vraiment de la conversation.

On les a vu à la féria de Béziers, ces placiers aux tee-shirts imprimés d’un bleu marin figurant l’étang de Thau, à l’effigie de l’appellation picpoul-de-pinet. Il faut dire que depuis vingt-cinq ans, l’appellation dispose d’une loge dans les arènes mythiques de la ville. Des arènes où les matadors Sébastien Castella et Enrique Ponce se sont produits ce millésime 2018, mano a mano.

Les deux matadors ont donc combattu 6 taureaux, 3 chacun. Dans cette figure, la tauromachie place les toreros dans un contexte de rivalité. Au style et à l’élégance du très expérimenté Enrique Ponce, le Bitterois Sébastien Castella opposait son insolente façon de toréer. La rencontre était intéressante puisque Enrique Ponce est le parrain de Sébastien Castella.

appellation picpoul-de-pinet

L’appellation picpoul-de-pinet représente 61% des vins blancs produits en AOC Languedoc

Il faut reconnaitre que depuis la cime des arènes de Béziers, le spectateur attentif peut apercevoir la mer. Alors Picpoul-de-pinet a non seulement le pied marin mais sait garder les pieds sur terre, en côtoyant le monde taurin : « Ce partenariat avec les arènes de Béziers dure depuis près de 30 ans. Je suis venu à la corrida avec mes parents », reconnait Frédéric Sumien, le président du syndicat de défense de l’AOP picpoul-de-pinet. Certes à l’époque, l’enthousiasme était plus grand, les anti-corridas absents et le public plus fervent. Mais bon, les temps changent. On oublie trop souvent les risques pris par ces hommes en habit de lumière.

« Quoiqu’il en soit, c’est un budget d’environ 12 000 euros qui est attribué chaque année à la présence de picoul-de-pinet dans les arènes aux côtés d’ambassadeurs de vins locaux et effervescents.  En 5 jours, ce sont 120 cols de picpoul-de-pinet qui sont dégustés pour cette occasion. Chaque jour, les arènes reçoivent entre 6 et 7 000 personnes, environ 35 000 personnes sur l’ensemble des corridas » commente le président de l’appellation.

Le matador Enrique Ponce ©BonBecBohème

Les arènes de Béziers

Le jeune matador Sébastien Castella ©BonBecBohème

Les arènes de Béziers

Les arènes de Béziers

De quoi travailler encore et encore la notoriété du picpoul-de-pinet. Un blanc maritime enfin dans la lumière. A l’export, il a su séduire les Anglais. Il intéresserait même les Hollandais pour son rapport qualité-prix. D’autant qu’au final, picpoul-de-pinet porte encore une image culturelle et historique du Languedoc.

cépage piquepou

Le cépage piquepoul est le cépage autochtone de l’appellation picpoul-de-pinet (c)MarcMédevielle

L’appellation a pour unique cépage le piquepoul qu’elle cultive sur 1800 hectares sur les communes de Pinet, Pomérols, Castelnau-de-Guers, Montagnac, Mèze et Florensac. Et si depuis trente ans, picpoul-de-pinet a rejoint la famille des coteaux-du-Languedoc. Depuis 5 ans, l’appellation a pris son indépendance en accédant à l’AOC/AOP picpoul-de-pinet. Et elle produit 12 000 cols annuels de ce vin blanc qui aime la mer.

Marqué par le sceau de l’histoire, elle n’est pas moins moderne. L’appellation a très tôt pratiqué la confusion sexuelle pour limiter l’emploi des pesticides. Et travaille même sur les cépages résistants.

Avec la mer pour horizon, cette appellation de blanc cultive l’art de vivre et le thème du voyage. Car avec 9 millions de cols vendus, 65% de la production part à l’export. Les plus friands en sont donc les Anglais. Et puis les Belges en raffolent aussi si bien que les Américains en demandent désormais.

Séduisant, couleur soleil, parfum d’iode, le picpoul-de-pinet est un vin de conversation. Aujourd’hui, le domaine Tarbouriech sur la commune de Marseillan, vient d’ouvrir un restaurant gastronomique avec une bonne carte de picpoul-de-pinet représentative de la diversité de l’appellation.

A noter que depuis quelques années, le style du picpoul-de-pinet a évolué. « Les vins sont plus gras, plus ronds et nous travaillons certaines cuvées haut de gamme », ajoute Frédéric Sumien. Parmi les caves engagées dans la démarche, une dizaine affichent déjà de très jolis profils de vins. « Là, les blancs ne passent pas en barrique. On privilégie l’élevage sur lies. Et le prix moyen habituellement autour de 6€ passe à 10€, ce qui reste attractif. » Cette sélection emporte une présentation plus soignée avec bouteille numérotée.

picpoul-de-pinet aux éditions de la Martinière

Livre AOP picpoul-de-pinet paru aux éditions de la Martinière, 25€.

Alors tous les étés, le picpoul-de-pinet célèbre la culture avec le festival de Thau et la féria de Béziers. A la rentrée, il projette de raconter sa véritable odyssée en Angleterre. Pour cela, Marc Médevielle publie un ouvrage sur cette appellation phare du Languedoc. Une histoire qui traverse toujours les mers. Le picpoul-de-pinet se prépare donc à voyager dans les mémoires et à l’international.

Par conséquent, ce bel ouvrage retrace une histoire déjà ancienne de cette viticulture du littoral languedocien au coeur du triangle Agde-Pézenas-Sète. Le récit est implanté autour de cette unique appellation de blanc du littoral languedocien et son cépage piquepoul. Ce dernier réfugié de l’étang de Thau connait une expansion dès le XIXe siècle et a cédé très tôt à l’appel du large. Vin maritime et de culture méditerranéenne, le picpoul-de-pinet séduit toujours bien au-delà des mers par son ouverture.

Christelle Zamora, photos (c)BonBecBoheme (corrida), Marc Médevielle (cépage piquepoul) et DR.


Christelle Zamora est une journaliste indépendante spécialisée dans le vin, la gastronomie et le tourisme. Elle a une formation de juriste en droit de la vigne et du vin, a suivi les cours du Wine and Spirit Education Trust (WSET), level 2 et 3. Impliquée dans la presse écrite de 1999 à ce jour, elle a co-écrit le Hors Série "1907-2007, un siècle rouge ardent" sur l'histoire du Midi rouge, période de fronde des vignerons languedociens et l'avancée de la mondialisation à compter des années 2000, pour Midi Libre. Pour ce titre, elle a intégré la rédaction des magazines pour 3 ans puis a été l'auteur d'un guide culturel. Parmi les artistes de la Bible de l'art singulier, éditions Livre d'Art en 2010. Elle a écrit plusieurs ouvrages dont "Limoux, vignoble d'histoire et de légendes" aux éditions Privat (nov. 2018), "Le vin en 365 jours" aux éditions PlayBac (oct. 2019), Le vin et la dégustation intuitive aux éditions Féret (nov. 2019).

  1. Christelle Zamora

    Merci, c’est vrai qu’ils se dégustent et se boivent sans soif.

    5 mai

  2. Les belges sont décidemment toujours là quand l’export est évoqué 🙂 Beau texte sur une AOP que l’on boit trop souvent, moi le premier, sans y prendre garde. J’aime beaucoup ta façon de décrire ce phénomène de manière positive : « Vin de conversation » est très positif, et très vrai.

    29 août