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L’amande, une exception française
L'amande made in France
France - Régions - Terre et mer

L’amande, une exception française

Un peu oubliée, la production d’amandes françaises pourtant qualitative reste un épiphénomène. Paradoxalement, l’amande made in France ou made in Provence connaît un certain regain.

«Il se consomme entre 25 et 30 000 tonnes d’amandons sur le marché français. Mais la production française s’élève à environ 150 tonnes par an. Quand l’amande a un cours mondial de 6 à 10 euros, l’amande française est à 12 euros », explique Hervé Bartelt, le directeur de Sud Amandes, à Garons.

Dans le Gard, Sud Amandes est la seule unité de coopération à recueillir la production de la Corse, du Vaucluse, de la Drôme, de l’Ardèche, de l’Aude, du Var, de l’Hérault ou du Lot.

L’amande du Sud

Avec une trentaine de producteurs et 600 hectares d’amandiers, la Corse couvre 50% du marché national. Et Hervé Bartelt dénombre neuf producteurs en Ardèche où la production est écoulée sur le marché local. Plus structurée, la production du Vaucluse compte une dizaine de producteurs, comme le Gard tandis que l’Aude, marquée par la crise viticole, s’est tournée vers l’amandier.

«Sur 137 adhérents, quatre-vingts sont réellement apporteurs et trente-huit sont des Corses. Sur l’île, la production est structurée autour de Corsic’Amandes, un groupement d’intérêt économique », ajoute-t-il.

C’est aux portes de Nîmes que la production est réceptionnée pour y être classée, triée, transformée puis répartie chez confiseurs et grossistes de la région parisienne ou du sud de l’Hexagone.

L’amande de Provence

L’amandier fait partie du patrimoine paysager provençal. Des producteurs ont aujourd’hui à coeur de remettre cette culture au goût du jour. Les frères Silvain, paysans-nougatiers, ont relancé un verger d’amandiers.

«Avec trente hectares d’amandiers à Saint-Didier, au pied du Mont-Ventoux (84), nous produisons dix tonnes d’amandons mais nous espérons doubler cette production», relève Adeline, la fille de Pierre, aujourd’hui exploitante.

Elle associe d’ailleurs cette culture à un élevage de moutons mérinos transhumant. Et cela dans le respect de la tradition et du paysage provençal.

«Ainsi, nous prenons soin de nos vergers car cela fait de l’engrais. Puis nous fabriquons le nougat avec notre miel, les fruits de nos vergers», dit-elle.

Et le produit est si bien valorisé que la marque est référencée en épiceries fines. Cet exemple de produit différencié illustre la tendance grandissante du made in France, voire même ici du made in Provence.

Donc, en Haute Provence l’amandier connaît un renouveau. Sur la plateau de Valensole, entre Manosque et Dignes-les-Bains, les conditions climatiques sont réunies pour le cultiver. Jusque dans les années 1930, certaines fermes y ont cultivé jusqu’à 80 hectares d’amandiers. Puis cette culture a disparu. Aujourd’hui, Jean-Pierre Jaubert, un des rares amandiculteurs de Haute Provence cultive dix mille pieds d’amandiers, soit 75 hectares.

À Oraison, l’histoire du confiseur Doucet est aussi très liée à la culture de l’amandier de Provence. Dans les cinq prochaines années, un plan de relance de l’amandier prévoit la plantation de 1000 hectares. Un plan déjà engagé sur le plateau de Valensole, dans la vallée des Baux de Provence et de la Crau. À Aix-en-Provence, la Confiserie du Roy René envisage même de planter ses propres vergers amandiers. 

Le namandier, un classique aux amandes

Le namandier, un classique aux amandes ©BonBecBohème – Recette en bas de page

L’Ardèche, un marché local

Très cultivée dans l’ancien temps, elle est une héroïne pour Olivier de Serres (1539-1619). Cet agronome a fait sa réputation au XVIIe siècle dans son traité, «Théâtre d’Agriculture et mesnage des champs», ouvrage fondateur pour l’agronomie française. L’auteur y rapporte l’importance des vergers d’amandiers en Ardèche au XVIe siècle. L’Institut Pradel chargé de faire vivre la mémoire de l’agronome s’emploie à transmettre ces connaissances. Aujourd’hui, à Saint-Marcel-d’Ardèche, Gisèle et Jean-Paul Darnoux cultivent 20 ha d’amandiers à la ferme Amanline. Il écoulent leur production localement mais leurs amandes sont connues bien au-delà du territoire ardéchois.

Les variétés de qualité

Parmi les styles d’amandes répertoriées, il y a les douces et les amères. En Provence, certaines sont plus célèbres que d’autres. La Dame de Provence, la Béraude dure – originaire du Vaucluse – sont appréciées en chocolaterie fine. Certaines variétés comme l’Aureille, la Princesse d’Ardèche, sont très anciennes. Cela tout autant que la Rabasse qui n’a rien d’une truffe.

Ferraduels, Ferragnès, Laurannes, Mandaline et Ferrastar, sont les cinq variétés actuellement cultivées. Créées par l’Inra dans les années 60, elles sont assez productives, dites de meilleure qualité gustative que l’amande espagnole ou californienne.

Aujourd’hui, l’amande française est recherchée mais en pénurie. «Nous ne sommes plus assez nombreux pour constituer une filière et la demande bio augmente…», avoue un producteur corse. Quoiqu’il en soit, ce fruit sec à coque riche en minéraux, calcium, phosphore, magnésium et vitamine E, B3 et B9. Parmi ses qualités, on lui reconnaît de faciliter le transit intestinal, de réduire le cholestérol et d’être bénéfique pour le coeur.

L’or blanc de Californie

La Californie compte 6 000 producteurs d’amandes et plus de 283 000 ha de vergers d’amandiers. Cet or blanc inonde les marchés européens et asiatiques. L’amande pèse 4 milliards de dollars dans la balance commerciale américaine. Couvrant 80% de la production mondiale, la production de Californie est de 950 000 tonnes d’amandes en 2015.

À la seconde place, l’Australie produit 140 000 tonnes. La quasi-totalité des amandes vendues en grande distribution est donc californienne. Ce sont généralement de petites amandes de variété Nonpareil cultivées de manière intensive. Son cours mondial n’est plus si élevé en 2016 car l’amande est concurrencée par d’autres fruits à coque. L’Espagne avec 50 000 tonnes à perdu sa seconde place sur l’échiquier mondial. Elle entend expérimenter un mode de culture de l’amandier avec une densité de 2000 pieds/hectare.

Christelle Zamora, sujet réalisé en reportage pour le Dauphiné Libéré en 2017, Midi Libre entre 2009 et 2012. Photos ©BonBecBohème 

Recette  Le Namandier de ©BonBecBohème

Le saviez-vous ?

Le Namandier est un gâteau habituellement préparé pour la Saint Jacques, fin juillet. Ce gâteau nous vient d’Espagne. Originaire de Galice, il porte le nom de Tarta de Santiago. Il fait aussi partie des habitudes culinaires du sud de la France. Peut-être en raison de la forte population catalane issue de la Rétirada (la guerre civile d’Espagne). En Galice, on le présente avec une croix et saupoudré de sucre glace. En France, on le tapisse plus volontiers d’amandes pilées.

Préparation : 10 min. Cuisson : 30 min.

  • 200 g de poudre d’amandes
  • 150 g de sucre blanc
  • 4 œufs entiers
  • 100 g de beurre fondu
  • 1 cuil. à café d’extrait d’amande amère

1. Dans un cul de poule, mélangez les 4 œufs et le sucre avec un fouet.

2. Pendant ce temps, mettez le beurre à fondre à feu doux.

3. Une fois fondu, ajoutez-le à la préparation.

4. Puis versez les amandes en poudre. Battez au fouet énergiquement pour avoir une consistance lisse. Ajoutez un petite cuillère d’extrait d’amande amère.

5. Foncez un moule à gâteau.

6. Faites préchauffer le four à 200°C. Puis, enfournez 30 min.

7. Le Namandier se déguste froid.


Christelle Zamora est une journaliste indépendante spécialisée dans le vin, la gastronomie et le tourisme. Elle a une formation de juriste en droit de la vigne et du vin, a suivi les cours du Wine and Spirit Education Trust (WSET), level 2 et 3. Impliquée dans la presse écrite de 1999 à ce jour, elle a co-écrit le Hors Série "1907-2007, un siècle rouge ardent" sur l'histoire du Midi rouge, période de fronde des vignerons languedociens et l'avancée de la mondialisation à compter des années 2000, pour Midi Libre. Pour ce titre, elle a intégré la rédaction des magazines pour 3 ans puis a été l'auteur d'un guide culturel. Parmi les artistes de la Bible de l'art singulier, éditions Livre d'Art en 2010. Elle a écrit plusieurs ouvrages dont "Limoux, vignoble d'histoire et de légendes" aux éditions Privat (nov. 2018), "Le vin en 365 jours" aux éditions PlayBac (oct. 2019), Le vin et la dégustation intuitive aux éditions Féret (nov. 2019).

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