Aujourd’hui, il n’est pas rare de trouver dans les assiettes de chefs renommés, des alliances que l’on n’aurait jamais osé autrefois. Et dans certaines, il arrive que la tendresse cite la nature. Ou peut-être est-ce la nature qui convoque la tendresse.
Si de prime abord, l’assiette de Lionel Giraud parait fort contrôlée, sa lecture en est subtile. Loin de se laisser impressionner par la difficulté, ce chef trentenaire – 1 étoile Michelin et 4 Toques au Gault&Millau – opère. Et, à La Table Saint Crescent à Narbonne, sa recherche culinaire est aussi méthodique que raffinée. Pour faire emprunt à l’univers du sculpteur, il faut dire qu’en cuisine, les matériaux ne manquent pas. Alors le chef dompte son oeuvre. Il mêle solide et liquide. Et sa cuisine jongle entre relief et parfums.
Au premier regard, Lionel Giraud apparaît plutôt du genre perfectionniste. De ces rigoureux qui ont été brimés par la pension. Il en résulte toujours du caractère. Voire quelque chose de sévère. Mais derrière le vernis de la rigueur, se cache parfois des trésors de délicatesse. Comme si le sens caché des choses pouvait prendre des traits culinaires. Alors visiblement, Lionel Giraud accorde à l’assiette le droit de métamorphoser le produit. Il en révèle l’émotion.
Dans les plats, la salinité donne le ton. D’abord parce que Lionel Giraud cuisine la mer. Maquereau, baudroie, mulet, crevettes… Et, tout le secret des chairs fraîches ou maturées de ses poissons réside dans L’ikejime – prononcez ikéjimé. Il s’agit là de bonnes manières. Car la méthode japonaise consiste à tuer le poisson sans stress. Ainsi, les chairs sont préservées et plus goûteuses. Si la cuisine de Lionel Giraud s’ancre en Méditerranée, elle s’inspire par conséquent de l’Asie.
Alors, les chips sont élaborées à partir de perles du Japon, un féculent à base de manioc. Les bouchées sont salines et fumées. Toutes sont croquantes et tendres. Poisson cru, algues, huître potagère éveillent les papilles. L’olive Lucques, transformée en gelée, devient fondante. Rien n’est ici cuisiné avec lourdeur. Quant au céleri remoulade (photo ci-dessus), il laisse béa. Notamment, avec ses saveurs de feuille de moutarde, noisettes grillées et de café. Dans sa simplicité, le beurre de fleur de radis est à tomber. Puis sur les poissons, le cédrat équilibre la note saline.
En conclusion, les accords mets et vins sont précis. Et le vin de France, domaine Les Clos Perdus, colle à merveille sur l’asperge au tartare de crevettes. Puis sur la baudroie, on goûtera un 100% macabeu à la fois minéral et toasté. Quand vient le moment du wagyu – élevé à la manière du boeuf de Kobé japonais – le domaine du Clos des Pères, AOP Minervois, est renversant. Il faut dire que la finesse est à son comble sur ce mets. Et l’accord avec ce Minervois (80% syrah – 20% grenache noir) poivré, prolonge le plaisir en bouche.
Et puis Lionel Giraud sait s’entourer. À seulement 22 ans, le sommelier Albert Malongo Ngimbi est prometteur. Il faut le voir présenter ses accords avec justesse. Et l’écouter raconter le vin avec décontraction. Il affectionne en particulier les vins du Languedoc et du Roussillon. Surtout, ses choix sont délicats. Plutôt portés sur des vins purs. On garde en mémoire ce blanc fumé des frères Danjou-Banessy (Roussillon) sacrément bon sur le fromage. Du genre nature et biodynamique.
En conclusion, l’accord du vacherin aux fraises d’Oraison et le muscat moelleux de Katie Jones est tout aussi heureux. Et là encore, le sucre ne l’emporte pas sur le fruit.
Christelle Zamora Photos ©BonBecBohème
Lionel Giraud, l’étoile montante de Narbonne
Aujourd’hui, il n’est pas rare de trouver dans les assiettes de chefs renommés, des alliances que l’on n’aurait jamais osé autrefois. Et dans certaines, il arrive que la tendresse cite la nature. Ou peut-être est-ce la nature qui convoque la tendresse.
Si de prime abord, l’assiette de Lionel Giraud parait fort contrôlée, sa lecture en est subtile. Loin de se laisser impressionner par la difficulté, ce chef trentenaire – 1 étoile Michelin et 4 Toques au Gault&Millau – opère. Et, à La Table Saint Crescent à Narbonne, sa recherche culinaire est aussi méthodique que raffinée. Pour faire emprunt à l’univers du sculpteur, il faut dire qu’en cuisine, les matériaux ne manquent pas. Alors le chef dompte son oeuvre. Il mêle solide et liquide. Et sa cuisine jongle entre relief et parfums.
Au premier regard, Lionel Giraud apparaît plutôt du genre perfectionniste. De ces rigoureux qui ont été brimés par la pension. Il en résulte toujours du caractère. Voire quelque chose de sévère. Mais derrière le vernis de la rigueur, se cache parfois des trésors de délicatesse. Comme si le sens caché des choses pouvait prendre des traits culinaires. Alors visiblement, Lionel Giraud accorde à l’assiette le droit de métamorphoser le produit. Il en révèle l’émotion.
Dans les plats, la salinité donne le ton. D’abord parce que Lionel Giraud cuisine la mer. Maquereau, baudroie, mulet, crevettes… Et, tout le secret des chairs fraîches ou maturées de ses poissons réside dans L’ikejime – prononcez ikéjimé. Il s’agit là de bonnes manières. Car la méthode japonaise consiste à tuer le poisson sans stress. Ainsi, les chairs sont préservées et plus goûteuses. Si la cuisine de Lionel Giraud s’ancre en Méditerranée, elle s’inspire par conséquent de l’Asie.
Alors, les chips sont élaborées à partir de perles du Japon, un féculent à base de manioc. Les bouchées sont salines et fumées. Toutes sont croquantes et tendres. Poisson cru, algues, huître potagère éveillent les papilles. L’olive Lucques, transformée en gelée, devient fondante. Rien n’est ici cuisiné avec lourdeur. Quant au céleri remoulade (photo ci-dessus), il laisse béa. Notamment, avec ses saveurs de feuille de moutarde, noisettes grillées et de café. Dans sa simplicité, le beurre de fleur de radis est à tomber. Puis sur les poissons, le cédrat équilibre la note saline.
En conclusion, les accords mets et vins sont précis. Et le vin de France, domaine Les Clos Perdus, colle à merveille sur l’asperge au tartare de crevettes. Puis sur la baudroie, on goûtera un 100% macabeu à la fois minéral et toasté. Quand vient le moment du wagyu – élevé à la manière du boeuf de Kobé japonais – le domaine du Clos des Pères, AOP Minervois, est renversant. Il faut dire que la finesse est à son comble sur ce mets. Et l’accord avec ce Minervois (80% syrah – 20% grenache noir) poivré, prolonge le plaisir en bouche.
Et puis Lionel Giraud sait s’entourer. À seulement 22 ans, le sommelier Albert Malongo Ngimbi est prometteur. Il faut le voir présenter ses accords avec justesse. Et l’écouter raconter le vin avec décontraction. Il affectionne en particulier les vins du Languedoc et du Roussillon. Surtout, ses choix sont délicats. Plutôt portés sur des vins purs. On garde en mémoire ce blanc fumé des frères Danjou-Banessy (Roussillon) sacrément bon sur le fromage. Du genre nature et biodynamique.
En conclusion, l’accord du vacherin aux fraises d’Oraison et le muscat moelleux de Katie Jones est tout aussi heureux. Et là encore, le sucre ne l’emporte pas sur le fruit.
Christelle Zamora Photos ©BonBecBohème
COMMENTS ARE OFF THIS POST